Chaque année à la période du Festival Extrême Cinéma la ville rose s’assombrit et nous invite à rejoindre les salles obscures de la Cinémathèque pour y découvrir un panel de films hors-normes. Cette année l’équipe de cet événement et ses invités nous attendaient du 7 au 15 février.
E. von Leerenwald s’était déjà attardé sur les festivals de cinéma extrême dans notre magazine de février de l’année 2018 (je vous invite d’ailleurs à le relire). Ayant à nouveau fait un tour, en cette année 2020, au Festival Extrême Cinéma de la Cinémathèque de Toulouse. Je me suis dit qu’il serait intéressant pour vous, chers lecteur.ice.s (et peut-être, chers novices du cinéma de l’extrême), de vous parler de ce que nous propose notre belle ville.
Un rapide historique du festival :
Pour commencer, prenons brièvement le temps de raconter l’histoire de cette manifestation. Ses débuts coïncident quasiment avec l’installation de la nouvelle Cinémathèque de Toulouse, rue du Taur en 1997.
Cet événement trouve ses racines dans un programme qui se tenait une fois par semaine à la Cinémathèque (le samedi soir) : « Les faubourgs du cinéma ». Il proposait des films sortis de l’ordinaire. L’idée émerge alors de créer un événement dédié à ces objets filmiques hors du commun. Ainsi est née la première édition en 1999 qui avait pour idée de ne pas rester focalisée sur une seule catégorie, mais de traverser les genres et de trouver des œuvres inclassables.
Depuis, 21 ans sont passés. De nombreuses années que la Cinémathèque de Toulouse donne rendez-vous une fois par an aux amateurs du cinéma de l’extrême. Cette manifestation s’est fait une place de choix dans le paysage des festivals de cinéma toulousains. Elle propose désormais un concours de courts-métrages qui a pris place seulement à partir de la douzième édition de l’événement (alors même qu’il était évoqué depuis ses débuts).
Les spectateurs ont pu y venir quasiment par toutes les saisons. Du printemps (avril à mai), à l’automne (entre octobre et novembre). Mais pour le moment c’est l’hiver que cet événement a choisi comme saison de résidence, puisque c’est la troisième édition où l’on se retrouve pour frissonner en février.
L’extrême : toujours plus décalé !
Comme dit par l’équipe du festival dans l’édito de cette nouvelle édition, les films extrêmes (au sens où on l’entendait il y a quelques années) ne sont plus mis au ban de la société. Ils sont désormais acclamés par la critique. Le grand public est très friand de tout ce monde fictif, il veut du sombre, du bizarre du cinéma qui dérange. Peut-être qu’en 2020 plus grand-chose ne peut-être considéré comme extrême. Alors il faut l’aborder d’une nouvelle manière et c’est ce que se propose de faire le Festival Extrême Cinéma en se renouvelant à chaque édition. Ne plus forcément choquer par des films seulement moralement ou visuellement dérangeants. Mais nous faire sortir de notre zone de confort en présentant des films que nous n’avons pas l’habitude de voir.
Pour créer de la diversité dans la programmation, l’Extrême Festival ajoute des cartes blanches qui sont données à différentes personnes qui s’intéressent au milieu du cinéma : un journaliste, un réalisateur, un écrivain, un programmateur de festival etc.. Tels sont les divers profils retenus.
Ainsi, pour vous faire un résumé incomplet de cette 21ème édition : Manuel Palomar (directeur artistique du Lieu – Commun, galerie d’art contemporain implantée dans le faubourg Bonnefoy) nous entraînait dans une soirée dédié au manga avec La Bombe (The war game de Peter Watkins, 1965) et Akira ( Katsuhiro Otomo, 1988). Eric Arlix (écrivain et éditeur) nous proposait, entre autre, de voir High Rise (Ben Wheatley, 2015) un film récent avec un casting au poil mais qui n’est pas pour autant acclamé par la critique à sa sortie. Jean-Pierre Dionnet (journaliste, producteur, scénariste, éditeur de bande dessinée…) nous conseillait, parmi d’autres, le film Bunny Lake a disparue (Bunny Lake is missing de Otto Preminger, 1965) ; un film en noir et blanc plutôt surprenant…
Rien qu’au travers de ces exemples on peut voir une grande diversité de la vision qu’une personne aura de “l’extrême” sur le grand écran.
Du cinéma ? oui, mais pas que !
Lors de cet événement, on flâne à des ciné-concerts (c’est ainsi que l’ouverture des festivités se fait habituellement), on se restaure au stand de nourriture, on déambule à travers des multitudes d’expositions (des affiches de films, des vieux fanzines, des œuvres d’artistes etc.), on s’intéresse à des rencontres et des conférences avec des réalisateur.ice.s ou des personnalités qui ont marqué.e.s le cinéma de l’extrême (ou ont été marqué.e.s par le cinéma de l’extrême)… Et c’est pas terminé ! Vous pourrez aussi écouter des émissions de radios en direct dédiées à l’événement, admirer les entractes artistiques entre les séances (concerts de petits groupes, performances, spectacles de danses…); vous remémorer les époques passées lors de projections d’archives qui vous re-situeront dans un temps passé et sa culture…
Mais oui ! J’y viens, on va aussi passer du temps dans les salles obscures (beaucoup de temps !), à regarder des œuvres cultes ou méconnues, pour la plupart étranges et dérangeantes. Mais les spectateurs ont aussi la joie de découvrir des films en avant-premières (petit conseil en passant, pensez à réserver en avance, car ces séances sont très prisées et donc très vite complètes). Sans oublier le fameux concours de courts-métrages (depuis quelques années, le jury est composé d’étudiants de tous horizons).
Quand on va dans ce genre d’évènement on s’attend à être choqué. Certes. Mais l’idée que l’on pourrait avoir d’une suite de films d’horreur très gores est en partie erronée. Pourtant cette idée est parfois appuyée par certaines affiches des différentes éditions du festival, notamment celle de 2019 (voir l’image ci-dessus) qui m’avait tout de suite évoqué la scène de l’œil dans le film Un chien andalou de Luis Buñuel (1929). Cela dit, peut-être que je me trompe, mais je ne pense pas que l’on aie pu voir l’intégrale de la série des films Saw à l’Extrême cinéma. Ce festival cherche à interpeller différemment, pour cela il s’intéresse à des films parfois très anciens, et pour certains oubliés (entre nous, on ne se demande pas pourquoi ils ont disparus quand on voit Agression de Gérard Pirès, 1975 projeté lors de la 20ème édition (cf: le journal de bord de la vingtième édition)). Attention ! cette manifestation ne fait pas de choix entre l’ancien et le nouveau, je dirais plutôt que c’est une recherche incessante de pépites cachées du 7ème art, qui reste dans l’idée d’être hors normes et de créer soit le frisson, soit l’angoisse, soit l’incompréhension, soit le malaise (voire tout à la fois). Bref comme le disent si bien les organisateurs de cet événement, le Festival Extrême Cinéma « cultive l’art de l’éclectisme, de la différence et du mauvais goût assumé ».
Merci aux programmateurs et à l’ensemble de la Cinémathèque de Toulouse pour ce festival qui fêtait en cette année 2020 sa majorité internationale ! Alors on vous dit à l’année prochaine pour une 22ème édition.
Lilith.
[…] mais l’on se surprend à trouver des excuses à ces comportements violents. C’est vraiment l’esprit de l’Extrême cinéma que j’ai retrouvé dans ce film car il est malsain et nous pousse dans nos retranchements à ne […]