Au Fifigrot cette année, deux films félins pour l’autre se sont côtoyés dans la programmation. Deux films à l’ode de nos amis à poils, qu’ils soient sauvages et indomptés, ou domestiques, fourbes mais tout aussi puissants…
Le premier film, ROAR, est un film qui s’ouvre sur un message qui se veut rassurant… Et qui pourtant met tout de suite en alerte. “Nous sommes fiers de dire qu’aucun animal n’a été malmené sur le tournage”. Pour les animaux, peut-être, pour l’équipe, rien n’est moins sûr.. Dès les 10 premières minutes, Noel Marshall est déjà momifié de bandages, les bras couverts de griffures de la taille d’une faille tectonique, tentant de rire pour sauver la face au milieu de dizaines de fauves sauvages qui lèchent ses plaies comme Philippe Etchebest savoure un bourguignon…
ROAR, c’est le délire halluciné de la classe bourgeoise par excellence : passionnés par les félins, Noel Marshall et sa famille décident de louer une vieille baraque abandonnée pour y loger toutes les espèces félines existantes sur la planète. Et d’en faire un film. Avec de vrais acteurs. Paumés. Qui séparent à MAINS NUES des combats de tigres indomptés.
Jeff Goldblum dira à propos de ce film que c’est « la pire idée de toute la longue et triste histoire des mauvaises idées ». Et on ne peut s’empêcher d’approuver, quand on sait que plus de 70 personnes ont été blessées sur le tournage, que Noel Marshall a été gravement blessé et que ses plaies se sont infectées (il a frôlé l’amputation) et que l’actrice Tippi Hedren (vous savez, l’iconique blonde des Oiseaux de Hitchcock, qui a décidément un compte à régler avec la gente animale) s’est cassé plusieurs fois la jambe sur le tournage…
Le résultat cinématographique se rapproche plus du nanar que de l’immense fresque écologique que souhaitait Noel Marshall. Au lieu d’une dénonciation de la nature humaine qui veut détruire toute vie sauvage, on assiste à la débâcle d’un projet cinématographique où rien n’est maîtrisé. Toutes les scènes puent le “one shot”, les acteurs sont à la ramasse et semblent – très légitimement – terrifiés. La photographie change au cours du film, la faute aux lions qui ont grignoté la jambe du chef op’. Le montage tente de cacher la misère en créant de la tension et des enjeux au milieu de cette immense débandade. ROAR est un ovni cinématographique qui aura au moins réussi un de ses objectifs : prouver que les animaux sauvages restent fiers, libres, indomptables, et que même un objectif de caméra est incapable de les capturer…
Indomptables et fiers, les fauves le sont aussi… Dans l’espace domestique ! C’est le postulat loufoque du mockumentaire L’Affaire Marvin, qui nous compte l’histoire d’un riche mégalo (encore un, décidément !) qui, grâce au buzz sur Internet, gagne des millions d’euros grâce à son chat Marvin… Jusqu’au jour où celui-ci, après avoir mangé des Golden Croquettes, disparaît du logement de son propriétaire. Furieux, celui-ci entame un procès contre le fabricant de croquettes, qu’il tient pour responsable de la fuite de son précieux chat. Une immense affaire médiatique va naître de ce conflit, et bouleverser – littéralement – la face du monde.
Complètement improbable, très drôle et pourtant profondément maîtrisé, L’Affaire Marvin rappelle les grandes heures de Canal+ et de son humour décalé. La ressemblance ne s’arrête pas là, puisque L’Affaire Marvin est aussi un film à l’humour très politisé, et actuel. Il nous questionne sur notre rapport aux réseaux sociaux et au “buzz” qui régit désormais l’espace médiatique, et qui entrave – souvent – la justice dans son travail. Une réflexion assez méta puisque le film lui-même, pour assurer sa promotion, fait appel à de nombreuses stars qui viennent faire des caméos, reprenant ainsi une technique de com’ très “Youtubesque”. Joey Starr, Rurik Sallé, Edouard Baer, sont autant d’invités qui viennent donner de l’épaisseur et du réalisme à ce récit. Réalisme accentué par de “vraies-fausses” images d’archives d’hommes politiques détournés, qui ancrent ce récit dans un “vrai-faux” réel.
Et le chat dans tout ça ? Figure centrale du film, L’Affaire Marvin surfe sur la “chatoxication” des réseaux sociaux où nos charmantes bestioles règnent en maîtres incontestés. La légende du chat indépendant, sans remords et à l’empathie plus que limitée pour son maître qui ne sert que de distributeur à croquettes est bien confirmée par ce film où Marvin devient une figure centrale iconique et despotique.
L’Affaire Marvin malgré son humour potache omniprésent ne tombe pas dans le piège des productions humoristiques qui oublient de soigner la forme. Porté par une équipe technique solide et par une vraie patte de réalisation, le film ne fait jamais cheap. Point positif de plus : le film ne se repose pas sur les lauriers de ses dialogues très drôles et très bien écrits. Tous les acteurs du film sont à la hauteur de la qualité d’écriture de ces textes. Du vrai, pur, esprit Grolandais qui trouve tout son sens dans la programmation du festival.
ROAR est à rattraper à l’American Cosmograph à Toulouse jeudi 20 septembre 2018 à 22 heures.
L’AFFAIRE MARVIN est à découvrir dans le cadre du Fifigrot, le vendredi 21 septembre 2018 au Gaumont à 19h30 en présence de toute l’équipe.
Dolores
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