Critique

Flow ou comment survivre à un monde apocalyptique quand on est un chat

Un worldbuilding simple en apparence seulement

Nommé pour le prix d’Annecy 2024, Flow est un film d’animation 3D nouvelle génération somptueux, retraçant l’épopée d’un chat dont le quotidien est totalement chamboulé par une soudaine montée des eaux. Ce monde, déjà mystérieusement vidé de toute présence humaine, dévoile peu à peu son nouveau visage au cours de la croisière forcée du félin. Secourus par un apprenti marin capybara, le petit matou et l’immense rongeur se laissent ensuite porter par leur bateau à voile en récupérant au passage d’autres compagnons d’infortune : un labrador, un lémurien et un oiseau exotique de la famille des échassiers nommé serpentaire. Un sixième animal, une baleine, surgit de temps en temps des profondeurs. 

Une entente rythmée de soubresauts inévitables

Cette équipe est composée de représentants de différentes espèces qui ne se ressemblent pas, ne parlent pas le même langage, n’habitent pas originellement le même habitat et ne partagent pas les mêmes habitudes. Et pourtant. Rassemblés par des circonstances qui les dépassent et mus par leur instinct de survie, il s’installe entre eux une entente nécessaire mais précaire, assaillie par plusieurs imprévus. Un des ces imprévus s’avère être l’arrivée turbulente du serpentaire alors qu’il est tiraillé entre diverses convictions : l’intérêt de la colonie, les divergences de priorités individuelles et les liens d’amitié. L’oiseau tiendra toujours un peu ses distances, malgré cela, sa place dans la bande ne sera jamais mise en doute : il choisit de protéger le chat en dépit de ce que ceci signifie pour les autres échassiers. Il en résulte un combat singulier qui lui vaudra une blessure à l’aile et qui l’handicapera pour le reste de l’histoire.  

L’eau et le chat 

La qualité de l’animation est exemplaire, ceci est particulièrement vrai pour l’eau. Omniprésente, le chat apprivoise peu à peu celle qui est à la fois source de crainte et source de confort. Au début, il ne cesse de chercher des promontoires en sécurité hors de portée des flots. Il manque même de se noyer à plusieurs reprises. Au fil de l’histoire, il s’aventure plus volontiers sous la surface afin d’attraper des poissons pour leurs repas et mieux appréhender la présence mystique de la baleine. Seul point de repère au sein d’une myriade de paysages changeant sans cesse, ce grandiose mammifère marin offre un sentiment de réconfort.

L’aventure de cet équipage est rythmée par un impeccable travail sonore, non seulement pour les comportements et le langage propre à chaque mammifère exempté de parole humaine, mais aussi pour l’habillage instrumental. Un savant mélange d’instruments concoctés par les compositeurs Richard Zalupe et Gints Zilbalodis porte le public tout au long de ce fantastique voyage nautique à travers les immenses vestiges de civilisations passées et pour apprivoiser ce tout nouveau monde.

Flow est un très beau film avare en paroles mais riche en émotions. Inattendu par son choix de sujet et la qualité de son animation si personnelle, il a su se faire une place reconnue au sein d’une industrie souvent affaiblie par une surcharge d’histoires aux péripéties trop souvent prévisibles.

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