Critique (2)

L’été dernier : ou la mauvaise définition de l’amour 

Je n’avais aucune intention de faire une critique de ce film, mais étant donné que j’ai vu la communication faite autour et que ça m’a plutôt étonnée, j’ai décidé de sortir du silence.

Je n’ai pas grand-chose à reprocher à ce long-métrage dans sa forme. Il est convenable, sans non plus être un chef-d’œuvre absolu, il n’est pas insupportable à regarder, le jeu d’acteur est assez bien mené principalement du côté de Léa Drucker. Samuel Kircher est en dessous, on sent qu’il est en début de carrière, mais il n’est pas tout à fait mauvais et saura s’améliorer avec les années. Le film n’a rien d’exceptionnel visuellement, mais il fait le travail. Ce qui me chagrine c’est plutôt le fond, et le sujet. L’actrice principale a elle-même dit en interview pour Télérama que tourner dans ce film a, je cite: « fais vibrer ma propre morale de femme, de citoyenne, de mère… ».

Mais commençons par le commencement, déjà, de quoi s’agit-il ? L’été dernier (Catherine Breillat, 2023) est un thriller amoureux que j’ai vu durant le Festival de Cannes. Il raconte une relation nocive entre une femme quinquagénaire (incarnée par Léa Drucker) et le fils de son mari (incarné par Samuel Kircher), qui lui est mineur. Le fait est que cette femme travaille, comme par hasard, 

en tant qu’avocate dans la protection de l’enfance, cela rend cette liaison d’autant plus toxique que la principale intéressée connaît tous les risques liés au fait d’entretenir une relation quasi incestueuse avec un mineur.

Ce que je reproche au film c’est de flirter avec le fantasme de l’éphébophilie et d’éviter autant que faire ce peu de condamner les actions de la belle-mère. Car l’adolescent joue de ses charmes avec elle et bien qu’elle puisse être faible, c’est à elle en tant qu’adulte d’imposer les délimitations. Ici, le scénario acheter cialis voudrait nous faire croire que malgré le fait que l’on joue avec les limites, tout est consenti et que c’est quasi « une belle histoire d’amour ». C’est d’ailleurs cet élément de communication qu’ils ont utilisé pour vendre leur film, ce qui m’a plutôt interloquée, car je n’étais pas certaine jusque-là de la manière dont la relation serait mise en avant. Voici mes notes en sortant de la salle, copiées directement : « ça ne sera assurément pas la Palme d’Or. Un film flou sur son propos. Dénonce-t-il la manipulation des adultes sur les enfants ou adolescents ? ou bien romantise-t-il le détournement de mineur ? » Comme on peut le constater, j’étais dubitative, je ne savais pas, entre machination et mensonges, si c’était effectivement dans le but de raconter une histoire « d’amour » ou une histoire de manipulation. Leur communication sur les réseaux sociaux a plutôt axé ça sur le côté romantique et en 2023, ça passe moyen pour moi !

Alors, notre magazine n’est pas militant, mais je soulève juste le fait que ce film est malsain. Sous couvert d’aborder un sujet tabou, il fait l’apologie de la corruption de mineurs. Et ça n’est pas parce que c’est une femme qui s’y adonne que c’est moins grave. Le même scénario aujourd’hui avec une jeune adolescente et un homme d’une cinquantaine d’années ferait bondir les gens, alors pourquoi dans ce sens cela devrait être différent ? Le film aurait très bien pu prendre un autre angle, mais non ! 

La filmographie de Catherine Breillat est connue pour son côté sulfureux. Elle aime mettre en scène des récits érotiques, voire quasi pornographiques. Jouer avec les limites c’est ce qui caractérise son art. En soi c’est un parti pris qui peut être défendu s’il a un intérêt et que c’est réussi. Mais le film ne renouvelle rien, et ça n’est pas comme si ce type d’histoire n’avait pas déjà été racontée un milliard de fois, dans bon nombre de scénarios. Mettre en scène un fétichisme malsain, en le faisant passer pour « une petite erreur qui n’a aucune grande conséquence, mais qui est malheureusement punie par la loi », ça me gêne. En plus, leur relation n’a rien à voir avec de l’amour, c’est principalement sexuel des deux côtés… 

L’été dernier est une adaptation du long-métrage danois The queen of hearts (May el-Toukhy, 2019). Dans cette œuvre, la situation n’est pas du tout amenée de la même manière. Déjà, c’est surtout la femme qui va vers l’adolescent, on la voit en quête de ses jeunes années, elle regarde son corps et le compare à celui de la copine du fils de son mari. Elle fantasme clairement sur lui et cherche à retrouver sa jeunesse dans les yeux du jeune homme. Mais l’inverse n’est pas visible au premier abord du côté de l’adolescent. C’est tout à fait différent dans la version française où il semblerait plutôt que le désir vienne du mineur. Il apparaît comme un séducteur qui veut charmer sa belle-mère dès les premières interactions (je trouve d’ailleurs ça très bizarre et un peu mal amené dans la version française.). Ce point de vue ferait passer la liaison pour une relation qui ne serait pas le fruit de la manipulation d’un adulte. La différence de mise en scène fait qu’on ressent plus amplement le côté malsain de la liaison dans le film original plutôt que dans l’adaptation. La version danoise est plus sombre, plus profonde et plus torturée. L’histoire tourne de manière avérée autour d’une relation pernicieuse qui se termine tragiquement. Ça n’est pas le cas dans la version française. Comme si ce type d’histoire pouvait n’avoir que des conséquences minimes sur la psyché d’un adolescent.

Dans L’été dernier, le propos est volontairement flou pour qu’un journal comme Transfuge pense que c’est, je cite: « un grand film d’amour ».

Moi je dirais plutôt que c’est un long métrage de manipulation, qui triture aussi les cerveaux des spectateurs et spectatrices en les persuadant que ce qu’il se passe dans cette œuvre est de l’ordre d’un fantasme « acceptable ». Alors bien qu’il puisse être concevable que chaque situation est différente, de mon point de vue, il n’est pas de très bon goût de faire l’apologie de ce type de comportements…

Comments are closed.