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BACKCOUNTRY La Nature déteste l’orgueil

Longtemps resté en exclusivité sur le catalogue américain de Netflix, Backcountry est un film d’horreur réalisé par Adam MacDonald et sorti en 2014. Il met en scène un jeune couple parti en excursion au milieu de l’arrière-pays canadien, dans la région de l’Ontario. Leur séjour va vite se voir perturbé par un ours noir particulièrement territorial. S’il est facile de classer le film comme une énième production de série B tout juste correcte à faire frissonner les adolescents de moins de quinze ans, force est de constater que de très bonnes surprises attendent le spectateur attentif. Au point de se demander si, presque dix ans plus tard, il n’y aurait pas de quoi s’inspirer des excellentes intentions injectées dans un long-métrage que personne n’anticipait, mais qui a su rester fidèle à sa ligne artistique jusqu’au bout. 

Après le requin des Dents de la Mer et les lions de L’Ombre et la Proie, c’est au tour de l’ours noir canadien de figurer parmi les pires scénarios d’animaux tueurs tirés d’une histoire vraie.  

Jen (Missy Peregrym) et Alex (Jeff Roop) incarnent un jeune couple rafraîchissant, charismatique et uni vaille que vaille dans la tourmente. © Christian Bielz
Jen (Missy Peregrym) et Alex (Jeff Roop) incarnent un jeune couple rafraîchissant, charismatique et uni vaille que vaille dans la tourmente. © Christian Bielz

Entre des ficelles scénaristiques éculées et des arguments convaincants : un entre-deux qui fonctionne, malgré tout.

Non, Backcountry n’a pas révolutionné l’histoire du cinéma. Il a néanmoins bénéficié d’une présentation au Festival International du Film de Toronto, où il fut par ailleurs diffusé pour la toute première fois et reçu plutôt positivement par le public. Ce qui accroche par-dessus tout, et ce qui constitue surtout le pilier du long-métrage, c’est bien son duo de personnages principaux. Jen, interprétée par Missy Peregrym (Smallville, Hawaii 5-0, Rookie Blue) et Alex par Jeff Roop (FBI : portés disparus, Numb3ers, Suits) incarnent à eux deux un jeune couple dans la trentaine, frais et pétillant. Les poncifs et les clichés semblent loin, aidés par une mise en scène qui, dès les premières minutes du film, s’efforce d’effacer au mieux les images d’Épinal d’ordinaire trimballées par Hollywood. Le résultat est sans appel : simple et efficace. Plutôt qu’une villa hors de prix, c’est le focus sur un parking souterrain rien de plus normal. Au lieu de gros plans insistants sur le dernier SUV, c’est la banalité d’un véhicule qu’on conduit facilement d’un point A à un point B. Au lieu de conversations forcées destinées à mettre plus tard en lumière un fait jugé crucial du scénario, c’est un échange malicieux autour d’un test de magazine sur le petit ami idéal, ou une danse débile dans la voiture sur un morceau connu par cœur. Les balises sont posées et révèlent pile ce qu’on espère d’une introduction : installer tranquillement les bases de leur relation et des tempéraments des protagonistes avant que ceux-ci ne soient jetés en enfer, tout en nous les rendant attachants. Le procédé est attendu, mais force est de constater qu’il n’est pas si facile de trouver des films de genre ne respirant pas la superficialité du processus à plein nez.

La bande-annonce

C’est par ailleurs l’une des forces principales de Backcountry : le film possède une identité qui lui est propre, aidé en cela par une bande-son étrangement planante et surprenante, parfaite pour propulser le spectateur dans une atmosphère travaillée. On se rappelle surtout du très intéressant The Descent, sorti en 2005 et qui, s’il comporte lui-même quelques imperfections de taille, avait pu se faire remarquer pour la profondeur et l’élégance de sa bande originale, composée par David Julyan. Il n’est toutefois pas rare que les films dits « d’horreur » pèchent, parfois par manque d’engagement artistique, parfois par manque de budget, sur un point pas toujours essentiel (et pas toujours nécessaire, il est vrai) : la musique. Ici, ce sont les Frères Lumières qui créent un album complet de pistes insinuant progressivement le malaise, l’incertitude, voire une véritable sensation d’inquiétude au fil du film. Plutôt que de voir cette progression se faire linéaire, les toutes premières secondes de Backcountry donnent le ton avec, d’office, des notes sans ambiguïté qui ne promettent qu’une chose : une issue périlleuse, et même fatale.

À la fois magnétique, envoûtante et sinistre : ici encore, Adam MacDonald brouille les pistes et offre à son spectateur une immersion réussie.

Loin d’être omniprésente, la BO du film sait se faire silencieuse quand il le faut. Un équilibre agréable et efficace pour souligner au moment voulu les retournements de situation redoutés, la tension, ou les échanges de dialogue entre les personnages. Il est d’ailleurs curieux de constater l’hybridation très étrange des morceaux composés. Leurs connotations très synthétiques ne jurent néanmoins guère avec l’environnement forestier. Tantôt chaudes puis froides, les mélodies discrètes se transforment presque en un langage propre à une nature incarnée, à la fois omniprésente pour mieux se renfermer sur elle-même l’instant d’après ; image de sa relation aux humains présents au sein de la forêt, tantôt hospitalière, tantôt dangereuse. Il y aurait beaucoup à dire sur le travail très impressionnant des compositeurs, inspirés et méticuleux, capables de proposer plusieurs nuances de son en adéquation avec les émotions des personnages. Un travail qui, en plus de mettre en lumière (sans mauvais jeu de mots) les pérégrinations de Jen et Alex, possède une consistance suffisante pour valoir en tant qu’œuvre à elle seule. 

Quand tu seras pas rentré à temps pour regarder Les Marseillais VS Le Reste du monde
Quand tu seras pas rentré à temps pour regarder Les Marseillais VS Le Reste du monde. © Christian Bielz

Si la musique livre ainsi une expérience cotonneuse et intimiste, le cadre du film joue lui aussi beaucoup sur cette sensation particulière. Quatre personnages seulement figurent à l’écran, dont deux secondaires. Backcountry se concentre sur la relation du couple formé par Jen et Alex, dont les acteurs poursuivent ce travail de cohérence et de crédibilité par un jeu naturel et sans fausse note. On sent entre eux un véritable échange, une complémentarité intrigante, deux visions certes souvent différentes sur un sujet, un objet, un choix à faire, mais aussi une affection sincère et authentique, qui leur permettront de rester soudés malgré leur lente désillusion. Jeff Roop révèle pour sa part le caractère fougueux de son protagoniste, assez séduisant pour nous donner envie de marcher dans ses traces. Acteur à la carrière particulièrement discrète, il jongle sans encombre entre un charisme suffisant pour rendre son interprétation assurée, tout en nous faisant oublier pour un temps qu’il s’agit bien d’un film grâce à son visage d’inconnu. Quant à Missy Peregrym, bien que plus présente sur les écrans, elle aussi parvient à nous embarquer dans son personnage de citadine peu habituée aux randonnées sauvages, s’attachant la caméra par un visage aux traits accrocheurs, par une voix convaincante et une persévérance qui fait mouche.

La proposition d’une œuvre contemplative aux plans lents et étudiés, plutôt qu’un enchaînement d’action et de sensationnel. 

Le film présente cependant une qualité inégale à bien des égards. La cause est multiple. Il faut d’abord évoquer un scénario qui, après aveux, a déjà été vu et revu en tant que base de l’horreur tournant autour du thème de la survie. Il n’y a pas vraiment de surprise tout au long du visionnage, et c’est peut-être là que le bât blesse, pour commencer. Malgré une volonté de brouiller quelques pistes préétablies, le bilan est mitigé : il est plutôt facile de deviner les étapes de l’histoire, et ce même sans avoir été mis au fait du récit dont le film est tiré. C’est néanmoins ce point précis qui peut nous aider à pardonner à Backcountry. Se voulant à la fois fidèle et original dans sa façon de traiter ce fait divers, le film s’inspire de la triste mésaventure du couple composé par Jacqueline Perry et Mark Jordan. Ces deux trentenaires ont eux aussi dû lutter contre les attaques d’un ours particulièrement agressif, au point de tuer la compagne de Mark Jordan, au mépris de plusieurs tentatives héroïques de sa part pour lui venir en aide. La délicatesse d’Adam MacDonald consiste à non seulement s’écarter des détails de l’histoire unique, mais de surtout éviter tout effet de sensationnalisme. Ici, pas de surnaturel, pas de référence directe aux vrais protagonistes. Le pacte tissé avec le spectateur est rempli en proposant le frisson via la fiction, tout en exposant un risque certes peu fréquent, mais qui existe : les attaques d’ours dans les parcs provinciaux canadiens

La longue descente aux enfers de Missy Peregrym souligne l’attention portée à la photographie de Backcountry.
La longue descente aux enfers de Missy Peregrym souligne l’attention portée à la photographie de Backcountry. © Christian Bielz

Le réalisateur utilise plusieurs effets, qu’il met au service d’une mise en scène aux plans jamais laissés au hasard. On sent toute la volonté de placer en exergue la splendeur intimidante des bois américains. On ne trouvera donc pas de shaky cam ni d’effet reportage. Le film se veut « beau » sans se montrer lisse, et même la transformation de la végétation en un environnement de plus en plus effrayant ne dénature pas l’esthétisme accordé aux différents cadrages. On peut saluer certaines initiatives risquées, mais qui fonctionnent : une fuite dans les zones forestière ne se concentrera pas forcément que sur le visage ni la silhouette terrifiée d’un personnage. Ce dernier s’échappe littéralement du champ d’une caméra occupée à transmettre la sensation d’agitation et d’affolement extrême par des zooms en zigzags assez brefs pour éviter l’aspect kitsch, mais assez percutant pour jouer sur la désorientation. Le résultat est concluant : tous les arbres paraissent se ressembler jusqu’à l’écœurement. À cela s’ajoutent des plans en contre-plongée, comme pour nous permettre de voir depuis le sol la cime des arbres immenses, ballotés par un vent que l’on devine froid, et dont seules les branches qui craquent composent l’environnement sonore des bois anxiogènes.

Backcountry n’épargne pas son spectateur, car les scènes d’errance sont interminables et pénibles, autant pour les personnages victimes de leurs erreurs que pour un public pas forcément conquis par l’immersion contemplative. Les autres apprécieront l’expérience, malgré le côté double tranchant de ce parti pris, risquant bien plus souvent de lasser que de fasciner son audience en donnant ainsi un sentiment de longueurs superflues.

Cependant, les efforts se portent sur de différents domaines de la réalisation, à commencer par certains visuels assez impressionnants. Depuis le maquillage des acteurs jusqu’aux apparences de carcasse ou de cadavres particulièrement marquants, c’est un sans-faute. On croit au sang, à l’errance, à l’épuisement progressif, renforcés par un sound design qui lui aussi entérine la plongée du spectateur dans le parc de Niboukazoo. L’utilisation d’un véritable ours pour le tournage était en outre une gageure. Talon d’Achille récurrent pour les films de genre, on évite heureusement aux images de synthèses ratées et autres procédés peu judicieux. MacDonald préfère d’ailleurs recourir à un effet d’attente déjà éprouvé avec succès par le requin d’Amity et les lions de Tsavo. Enfin, le travail effectué sur la photographie de l’animal conforte le spectateur dans un profond malaise, car confronté à une menace sans équivoque et ne laissant que peu d’échappatoires possibles.  

Pulsion de prédation.
Pulsion de prédation. © Christian Bielz

La consistance du long-métrage tient bon, du début à la fin. Jusqu’au bout, on se croit avec eux, perdus dans un parc aux dimensions démesurées, déboussolés par une météo ingrate et une angoisse latente. La romantisation plus que limitée des pérégrinations de Jen et Alex jouera aussi beaucoup sur la perception d’un spectateur avide de réalisme. Pour une situation déjà assez grave en tant que telle, il n’y a nul besoin pour MacDonald de rajouter des couches de drame inutiles. Une sobriété bienvenue. En un enchaînement de causes à effets certes parfois attendus, mais toujours logiques, les « Pourquoi ? » face aux périls trouvent rapidement une réponse, tout en préservant une part de mystère dans l’acharnement provenant de l’ours territorial. Une énigme partagée par France Culture, qui a publié en janvier 2020, via le podcast des Pieds sur terre, l’expérience douloureuse de Camille et de sa rencontre terrifiante avec un plantigrade.

L’âme de Backcountry se révèle par une déclaration d’amour évidente à un bijou filmique : Délivrance

Il serait impossible de ne pas évoquer l’une des raisons les plus importantes de défendre ce film. Backcountry se démarque, non seulement pour son identité artistique complète, mais également par sa volonté de s’inscrire dans un héritage cinématographique fondamental. Si l’on ne devait citer que deux références, il s’agirait bien entendu de l’indispensable Délivrance, réalisé par John Boorman en 1972 et – à peine moins flagrante – du Projet Blair Witch, sorti en 1999 et réalisé par Daniel Myrick et Eduardo Sánchez. Ces monuments du genre de la survie – puisant du côté du thriller pour l’un, et de l’horreur pour l’autre – perdurent encore dans les mémoires comme jalons des grandes histoires d’aventures et de frisson en plein milieu des bois.

Pour rappel, Délivrance met en scène quatre hommes, tous très différents, et plus ou moins amis entre eux, s’échappant de leur quotidien pour s’adonner au canoë-kayak pendant tout un week-end. L’enjeu ? Profiter de la beauté d’une rivière qui, dans quelques mois, sera condamnée à être asséchée par des travaux d’aménagements de la région. Mais une menace surprenante s’apprête à faire voler en éclats ce tableau idyllique.

Côté personnages, Jen présente une ressemblance frappante avec Ed Gentry, interprété par Jon Voight. Marié et père de famille, appréciant son confort de citadin, il se décrit comme paisible et enjoué, prêt à prendre le bon là où il se trouve, via une virée en pleine nature. Ed et Jen incarnent des rôles à l’équilibre précieux, ainsi qu’une forme de raison solide, qui ne s’échappe jamais, qu’importe le coût et les épreuves à affronter. Ils se retrouvent impliqués malgré eux dans une suite de catastrophes et de drames qui n’en finissent pas, leur acharnement et leur volonté de faire front face à « l’ennemi » les aideront à progresser aussi loin que possible. Tous deux se révèlent finalement bien plus forts que ce qu’il y paraissait au départ. Ce sont eux qui trouvent leur second souffle, leur capacité étonnante à survivre même en milieu hostile. Vigilants, attentifs, leurs sens se décuplent et les prédisposent à braver le prochain danger de la plus efficace des manières. C’est ainsi que Jen fait preuve d’une observation surprenante : c’est elle qui flaire les odeurs étranges, elle qui s’équipe en amont d’une expédition dont elle ne sait après tout pas grand-chose. Ed et Jen préfèrent les faits à la foi, se cramponnent à leurs perceptions, même défaillantes, et s’accrochent jusqu’au bout des griffes à l’espoir d’en sortir vivants. Une scène de descente périlleuse le long d’une roche humide pour Jen offre un clin d’œil perspicace aux propres tentatives d’escalade d’Ed, tous deux en proie à un moment de tension critique.

Quand tu commences à comprendre que ça va vraiment pas bien se passer.
Quand tu commences à comprendre que ça va vraiment pas bien se passer. © Christian Bielz

La comparaison semble encore plus évidente, lorsqu’on se penche du côté d’Alex. Celui-ci trouverait sa filiation spirituelle dans le personnage de Lewis Medlowk, et pour cause. Difficile en effet, de ne pas penser à rebours à la seule évocation du nom de famille d’Alex dans Backcountry… : Lewis. Tous deux incarnent la passion brute, la pulsion comme l’impulsion d’un désir fantasmé. Leur enthousiasme parfois sans réflexion profonde, en dépit des apparences, s’efface de temps à autre au profit d’un découragement malvenu, et peu propice à la survie en pleine nature. Leurs bonnes intentions ne suffisent pas à faire d’eux des êtres fiables, quand bien même mettent-ils tout en œuvre pour le faire croire aux autres personnages. Leur excès de confiance tend vers un orgueil qui, on le devine, sera puni tôt ou tard par le destin, voire l’environnement lui-même. Cette nature qu’ils prétendent révérer, adorer du plus profond de leur être, mais qu’ils ne respectent jamais autant qu’ils le clament à qui veut bien l’entendre… Si Lewis Medlock ne manque jamais de faire preuve d’une emphase parfois gênante, malgré cet amour pour la rivière que l’on désire croire authentique, il se transforme bientôt en une victime démunie de la furie des éléments, trahi par ce cours d’eau qu’il a, finalement, bien sous-estimé. Alex commet exactement les mêmes erreurs. Impatient de faire découvrir à sa compagne un lac associé aux moments heureux de sa jeunesse, il se révèle incapable d’en retrouver le chemin… ni même de connaître le véritable nom du lac en question. Un grain de doute semé assez tôt dans l’esprit du spectateur qui, déjà, peut s’interroger sur la fiabilité d’un guide refusant la carte proposée par un ranger du parc. Les attitudes bravaches d’Alex et Lewis cachent des failles béantes (une sorte de vide professionnel pour l’un, d’inadéquation à la société pour l’autre), dangereuses à la fois pour eux et pour leurs proches. Malgré les avertissements, Lewis s’acharne à descendre une rivière que même les locaux paraissent redouter. Malgré les conseils de prudence, Alex s’aventure dans les bois en automne, augmentant les risques de se retrouver désorienté (les changements météorologiques sont plus importants pendant la saison), mais aussi de croiser des ursidés en pleine préhibernation et dans un comportement de prédation absolue. Il répand son odeur en multipliant les contacts indésirables, et la caméra ne manque jamais de prévenir son public par des plans significatifs (sa façon de toucher les troncs à répétition, ou de laisser une paire de chaussettes en sang à l’air libre près d’une tente…). Alex sera en effet le premier à se blesser… exactement comme Lewis. Un comble, pour des guides censés être aguerris à la forêt.

Burt Reynolds (à gauche) et Jon Voight (à droite) : tandem de choc dans Délivrance
Burt Reynolds (à gauche) et Jon Voight (à droite) : tandem de choc dans Délivrance. © Vilmos Zsigmond

Enfin, les scènes sous la tente sont suffisamment immersives pour agir en clins d’œil amicaux envers le Projet Blair Witch. On croit à l’angoisse de Jen, qui n’est pas sans nous évoquer celle d’une certaine Heather Donahue. La pression d’une mâchoire d’ours remplace celle de doigts d’enfants, les glands chantent à la place des pierres, mais la comparaison s’impose au spectateur attentif. Les branches cassées par l’animal en rappellent d’autres : les sculptures de la sorcière du Maryland. Au lieu d’une souris morte, c’est un corbeau qu’enjambent Jen et Alex, présage macabre filmé via un plan débullé et toujours accompagné des morceaux étranges des Frères Lumière. L’inquiétante singularité d’Eric Balfour dans un rôle bizarroïde, quant à elle, renvoie à la peur de Mike, Josh et Heather de se faire pourchasser et suivre dans les forêts par un individu malfaisant.

Backcountry n’était sans doute pas le film à retenir de la rentrée 2014. Pourtant, il serait bon de se pencher sur ce qui, à peu de choses près, aurait pu se transformer en une petite pépite d’horreur à revisionner de temps à autre. Pour la beauté de ses plans, pour la maîtrise de sa bande-son, et surtout, pour l’affection véritable transmise par Adam MacDonald au travers de ses multiples hommages, le réalisateur impose une nuance à prendre en considération. Il se démarque toutefois assez, sans aller jusqu’à hisser sur un piédestal une œuvre se voulant de toute évidence sans prétention, en refusant avant tout la médiocrité d’un tournage facile et sans consistance. Par la finesse de son regard, il a su transformer un énième fait divers adapté en scénario hollywoodien en un divertissement de bonne facture et se revendiquant de deux productions importantes de l’Histoire du cinéma. De quoi largement inviter ses confrères à s’inspirer de son travail, mais surtout de l’authenticité d’un projet qui tranche amèrement avec les créations du même acabit fades, sans saveur et tout à fait oubliables, qui pullulent depuis trop d’années.

                                                                 

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